Juin en dents de scie

Entre la canicule et les orages violents qui ont apporté grêle, vent et inondation des écuries à plusieurs reprises, la période mi-mai/mi-juin n’a pas été de tout repos cette année !

Par chance un créneau favorable a permis de faire une récolte d’excellent foin (moitié en petites bottes, moitié en rounds), l’alimentation de l’année à venir est assurée pour ma petite troupe !

La fenaison est toujours une période aussi stressante, surtout quand le vieux matériel semble chaque année sur le point de rendre l’âme…
Une fois le foin rentré, l’adrénaline retombe et, pendant quelques jours, difficile de retrouver l’énergie pour les multiples travaux qui ponctuent le quotidien d’une ferme !

Et les naissances continuent gentiment à ponctuer le printemps, les filles ont eu la sagesse de respecter mes consignes et d’attendre la fin des foins pour se libérer de leur fardeau ! C’est étonnant cette année, malgré l’absence d’hiver rigoureux la durée moyenne des gestations est beaucoup plus longue que les années précédentes, aucune n’a duré moins de 11 mois, plusieurs tutoient les 12 mois… Cette météo en folie perturbe les animaux autant que nous ! 🙁

Mai/juin est aussi une période d’intensification des multiples coups de fil et mails que tous les éleveurs connaissent bien… Les raisons en sont multiples.
Parfois c’est juste un mot sympa pour me remercier des infos que je mets sur mon site, ou pour m’encourager (mon dieu que ces messages font plaisir !), ou bien pour donner des nouvelles d’animaux vendus (ça aussi, quel bonheur de savoir ce que deviennent mes loulous !). Ou des questions concernant la laine et les stages.

Le plus souvent, bien sûr, les demandes portent sur l’élevage…
Il y a bien sûr les demandes de visite qui explosent avec la belle saison… Répondre aimablement (même quand l’interlocuteur déçu se montre désagréable) que les visites se font uniquement suivant un planning précis, et que oui, elles sont payantes… Il faut parfois expliquer qu’un élevage n’est pas un parc d’attraction accessible 7 jours sur 7, que c’est un lieu de travail où on ne peut accueillir à la demande toute personne qui veut satisfaire sa curiosité ou montrer des alpagas au petit dernier…
Il y a les personnes désirant se renseigner sur les alpagas pour en acquérir. Rien de plus normal pour l’éleveur que ces contacts heureusement le plus souvent sympathiques et constructifs, mais parfois au bout du fil ou du clavier la personne ne semble pas toujours consciente qu’elle se renseigne sur un animal soigné au quotidien, et non sur une paire de chaussure stockée sur une étagère dans un placard ; et qu’un alpaga élevé et éduqué avec soin par un professionnel soumis à des charges et à la TVA ne peut pas être vendu au prix d’une peluche à la foire du Trône 🙁
Et il y a aussi (et de plus en plus souvent) les personnes qui ont acheté des lamas et/ou alpagas à des maquignons, sans aucun conseil ni suivi, cédant sur un coup de tête à une mode et à un vendeur sans scrupules (merci en particulier les zoos et parcs animaliers qui font n’importe quoi dans ce domaine, c’est lamentable, je vais faire un article là-dessus bientôt !). Personnes qui se retrouvent débordées par une maladie de leur pauvre alpaga (qui vit seul, ou en couple, ou avec des chèvres – toutes situations qui génèrent fréquemment hélas de graves soucis), par un comportement problématique, par une naissance impréparée…
Personnes dont le vendeur est bien entendu aux abonnés absents, injoignable depuis l’instant où la vente a été conclue (ce type de vendeurs est d’ailleurs le plus souvent incapable de conseiller correctement, de toutes façons)…
Personnes qui savent bien, cette fois, trouver sur Internet les coordonnées d’un éleveur professionnel pour demander de l’aide. C’est notre boulot, nous dit-on !

J’aide toujours quand il s’agit d’une vraie urgence, beaucoup peuvent en témoigner. L’entraide est importante car parfois même avec une formation correcte ou une bonne expérience on rencontre un problème qu’on ne peut résoudre sans faire appel à un réseau.
Mais j’en ai marre de jouer au conseiller de service toujours disponible pour les personnes qui n’ont pas pris le temps de réfléchir et de se former un minimum avant d’acheter le premier animal venu ou de s’improviser éleveur sans aucune connaissance 🙁
Je suis désolée, mais notre boulot d’éleveur n’est pas d’être à disposition 24h/24 de ceux qui nous prennent pour des imbéciles…
Le bénévolat, j’en fais, pour les alpagas et dans d’autres domaines, mais comme tout un chacun je choisis pour qui et pour quoi je donne mon temps, je n’aime pas qu’on me l’impose. Alors quand il s’agit d’exploiter mes compétences professionnelles, là aussi, comme tout un chacun, je souhaite une juste rémunération de mon travail…