Le problème de l’imprégnation des mâles : le syndrome du mâle furieux

LE PROBLÈME DE L’IMPRÉGNATION

(Mon texte évoque les alpagas, que j’élève, mais le problème est le même avec les lamas).
L’alpaga a une popularité croissante dans la société, son statut d’animal de compagnie séduit, d’autant qu’il ne nécessite (pour le moment) aucun certificat de capacité.
Mais hélas il est trop souvent présenté comme une peluche à cajoler, que l’on peut avoir seul sur un bout de jardin, traiter et éduquer comme un petit chien 😡
Trop de personnes en achètent ou en élèvent sans s’informer correctement, et sans aucune précaution de manipulation des jeunes, initiant chez ces animaux le « syndrome du mâle furieux » (berserk male syndrome), également appelé « syndrome de comportement anormal » (aberrant behavior syndrome) car le problème peut aussi toucher (à un degré moindre) les femelles.
 
Manipulé comme une peluche au cours de ses premiers mois, le cria devient très proche de l’homme, un vrai petit nounours qui vous fait des câlins, vous suit partout, joue avec vous, se comporte réellement comme un petit animal domestique. On en voit, sur les réseaux sociaux, qui dorment dans la maison, vous accompagnent faire les courses… C’est tellement mignon, tellement vendeur 😡
 
Sauf que vers 2 ans 1/2, quand il atteint la maturité sexuelle, le jeune alpaga trop cajolé ne vous voit plus comme un copain de jeu mais comme un rival… Il n’a pas appris que vous étiez un humain, avec des codes différents des siens : son instinct le pousse à protéger son groupe, comme il le ferait face à un congénère extérieur, et, dans le cas d’un mâle, à défendre physiquement son territoire. Le gentil toutou se transforme inévitablement en animal agressif, voire dangereux.
 
L’agressivité monte par paliers jusqu’à atteindre un point de non-retour : ce gentil petit animal qui venait chercher des caresses, vous mordillait et jouait comme un chien, commence un jour à vous bloquer le passage, à vous bousculer un peu, puis de plus en plus il vous défie quand vous arrivez, claque des lèvres et se dresse pour intimider, vous crache directement dessus, vous interdit d’entrer sur son territoire… et l’étape suivante peut être l’agression pure et simple si vous persistez : il se cabre, attaque, piétine, mord, exactement comme il fait avec ses congénères… Et le mâle possède 6 dents de combat, redoutables crochets recourbés vers l’arrière, que trop peu de propriétaires se soucient de faire limer chaque année entre 3 et 5/6 ans…
 
Ce comportement est bien connu des éleveurs, qui doivent tout faire pour l’éviter. Mais hélas, avec la mode actuelle et l’absence de règlementation, la majorité des jeunes animaux du marché sont produits par des particuliers, des éleveurs amateurs inconscients, des cirques, des zoos et fermes pédagogiques, dont certains méconnaissent de manière dramatique ces animaux qu’ils produisent et vendent sans état d’âme à prix cassé…
 
Des jeunes adooorables, parfois élevés au biberon, ou des adultes atteint du syndrome mais présentés sur terrain neutre par des vendeurs habiles (l’agressivité se manifestera parfois quelques jours seulement après l’installation sur le nouveau territoire)… Les prix sont tellement séduisants que l’acheteur novice craque forcément… ignorant qu’il achète une véritable bombe à retardement !
 
L’imprégnation est plus grave chez le petit camélidé que chez les autres mammifères, parce que chez lui la caresse n’est pas naturelle ni apaisante : la mère ne lèche pas son petit, le contact prolongé ne fait donc pas partie de ses codes sociaux, et en cajolant un cria on amène son cerveau à se structurer sur de mauvaises bases, inconnues de son espèce. Et c’est irréversible. Certains animaux sont tellement dangereux pour l’humain que l’euthanasie est la seule issue possible ! La castration peut atténuer le problème dans les cas d’imprégnation légère, mais elle ne le résout pas, hélas.
 
Alors si on vous présente des alpagas à vendre, quel que soit l’âge, fuyez ceux qui vous collent et cherchent des câlins, mordillent vos vêtements, vous bousculent… Exigez de rencontrer vos futurs animaux dans le pré où ils vivent avec leurs congénères (et non sur un lieu neutre), et observez leur comportement à votre arrivée et pendant votre visite. Un animal correctement élevé s’approche par curiosité, vient parfois vous flairer calmement et même manger dans votre main, il peut aussi se laisser caresser si c’est un adulte, mais il ne doit pas entrer dans votre espace personnel sans y être invité, ni se montrer entreprenant.
 
Pour votre sécurité achetez un animal qui montre du respect envers l’homme. Ce sera un excellent compagnon, que vous pourrez manipuler sans danger, dans un climat de confiance. Et bien entendu ne le laissez jamais vivre seul de son espèce, ni en groupe mixte, pour son équilibre, et sa bonne santé physique et mentale.
©Christel Chipon – Alpagas de KerLA  – 2015 màj 2020

 

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Sevrage et éducation

La fin de l’année s’accompagne du sevrage des crias du printemps (qui naissent ici entre mars et mi-mai). Sauf souci de santé particulier, les crias mâles sont sevrés et séparés des femelles au plus tard à 7 mois, car leur libido précoce peut vite poser des soucis : en principe leurs tentatives de saillies ne peuvent pas porter leurs fruits avant 2 ans révolus, pour des raisons physiologiques, mais, toute règle ayant ses exceptions, il peut arriver qu’une saillie réussisse, par accident, dès le 8e mois. Donc prudence.
Les crias femelles, en revanche, peuvent sans problème rester plus longtemps avec les mamans, c’est très bien pour leur moral. L’important est de les séparer au minimum 2 mois avant la naissance du cria suivant, afin qu’elles ne perturbent pas la nouvelle lactation.
Attention : il faut sevrer plus rapidement si la maman montre des signes de fatigue et de perte d’état à cause d’une lactation prolongée trop exigeante pour son organisme.

Ce printemps, les 3 petites femelles étant nées en début de saison, et les 3 petits mâles en fin de saison, j’ai pu sevrer les 6 ensemble début décembre, ce qui est bien pratique et confortable pour eux : rester en groupe réduit beaucoup le stress.

Passés les premiers jours, où je me contente d’être très présente et de les rassurer, je peux commencer l’éducation proprement dite. Certains le font plus tôt, dès 4 mois, sous la mère : c’est une possibilité si c’est fait avec rigueur pour éviter l’imprégnation. Mais comme je suis quasiment toujours seule pour manipuler les animaux, il ne m’est guère possible de mener la mère en longe et d’éduquer le cria en même temps. J’ai toujours pratiqué l’éducation au moment du sevrage, laissant les crias tranquilles tant qu’ils ne sont pas sevrés, et cela fonctionne très bien.

Il suffit d’environ une semaine, avec quelques minutes par jour dans le parc de travail, pour leur apprendre en douceur à accepter les manipulations, le licol et la longe.
Ensuite quelques courtes séances de balades sur la ferme, toujours à 2 ou 3 crias ensemble, pour apprendre à marcher à la demande, à s’arrêter, à patienter à l’attache, à monter dans le camion…

L’étape suivante, c’est apprendre à se laisser prendre les pattes, à l’attache, pour que son humain préféré puisse tranquillement couper les onglons. Prendre les pieds d’un animal de fuite génère un stress intense, c’est donc essentiel de les y habituer très jeune, calmement, et de pratiquer régulièrement ce geste indispensable (comme avec un poulain) : les onglons ne se coupent pas qu’une fois par an à la tonte, il faut intervenir au minimum tous les 3 mois, voire plus souvent pour certains animaux.

Cocktail, Cachou et Cisko dans leur nouveau parc, du côté des mâles.

Une fois les bases d’éducation posées, les crias mâles et femelles ne peuvent bien sûr pas rester ensemble : les petits mâles rejoignent un nouveau parc du côté des mâles, ils y côtoient leurs copains plus âgés, et souvent, une fois la prise de contact réussie, ils sont fondus en un seul groupe.
Cette année les 3 petits mecs du printemps (Cachou, Cocktail et Cisko) se sont mélangés aux copains de 2024 au bout de quelques heures seulement, sans aucun souci : la différence d’âge n’était que de quelques mois, et une partie des jeunes plus âgés étaient déjà castrés.
Mais attention : il ne faut surtout pas mettre ces jeunes avec les mâles reproducteurs, car le stress généré peut entrainer très vite des soucis de soucis, sans parler du risque de blessure grave.

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