GÉRER les NAISSANCES
La gestation dure de 11 à 12 mois chez une alpaga, de 11,5 à 13 mois chez une lama : la patience est donc de rigueur !
LA MISE-BAS :
Le bébé (appelé cria) naît presque toujours en journée, entre 10h et 16h, et par temps clément. L’atavisme explique ces naissances méridiennes : d’une part la mère ne peut pas lécher son petit, donc le cria dans la nature doit pouvoir sécher naturellement au soleil avant d’affronter le froid de la nuit; et d’autre part dans les montagnes des Andes (dont les alpagas sont originaires) les prédateurs de petits camélidés (les pumas surtout) chassent au crépuscule, heure à laquelle le jeune doit déjà pouvoir tenir solidement sur ses pattes pour ne pas servir de dîner.
Ceci dit, il y a des exceptions à toute règle : des naissances surviennent parfois tôt le matin, tard le soir, voire la nuit (ce dernier cas étant exceptionnel et le plus souvent lié à des dystocies), et parfois sous la pluie… Une surveillance permanente est donc indispensable.
Pour mettre bas, la femelle reste le plus souvent debout, dehors, au milieu du troupeau attentif et protecteur.
La naissance est rapide quand tout se passe bien. Il est assez rare d’avoir à intervenir pour une dystocie grave, mais aider un peu la mère quand la mise-bas est longue et difficile permet de limiter sa fatigue et celle du cria, et aussi d’éviter le risque d’hypoxie pour le bébé.
Voici la vidéo de la naissance du petit NÉRYS, le 30 septembre 2015 :
LES PREMIERS SOINS :
Les premiers soins au nouveau-né consistent en une série de gestes juste après la naissance :
- vérifier qu’il respire bien et que sa bouche est dégagée (passer un doigt dans la bouche)
- vérifier son intégrité (absence de malformation)
- désinfecter le cordon ombilical dans un bain de teinture d’iode
- injecter un peu de vitamines AD3E et du Biodyl (Selenium) pour booster son immunité.
Si la météo n’est pas très bonne, frotter avec une serviette pour accélérer le séchage est une bonne chose. S’il fait venteux et humide, il ne faut pas hésiter à rentrer le bébé avec sa mère, le réchauffer au sèche-cheveux et le couvrir d’un manteau adapté.
Le port du manteau est conseillé les premiers jours si le temps est humide ou venteux (il existe des manteaux pour alpagas, mais les manteaux pour chiens conviennent très bien – taille 35 à 40cm pour un nouveau-né).
LE COLOSTRUM :
Il est important de surveiller la première tétée pour s’assurer que le cria absorbe le colostrum indispensable à sa bonne santé. Le défaut de colostrum entraînerait l’échec du transfert d’immunité de la mère au petit, qui se fait exclusivement via le colostrum, et non au cours de la gestation comme dans certaines espèces.
Si le cria n’a pas assez de forces pour téter, n’a pas le réflexe, ou si sa mère ne le laisse pas faire (fréquent chez les primipares qui se demandent ce qui leur arrive), il faut intervenir, car la prise du colostrum dans les 12 premières heures (idéalement le plus tôt possible après la naissance) est vitale pour le cria.
Il ne faut pas hésiter à traire la mère pour recueillir ce précieux premier lait (60ml minimum en plusieurs traites rapprochées si nécessaire), et le faire prendre au cria avec une seringue drogueuse ou, mieux, un biberon, qui va déclencher le réflexe de succion.
Une sonde stomacale est parfois nécessaire en cas d’absence de réflexe de succion, ou pour un cria trop faible (j’ai eu à le faire pour deux naissances, c’est un peu stressant, mais beaucoup moins compliqué qu’il n’y paraît)
Si le cria ne peut absorber de colostrum (notamment si la mère n’a pas de lait), du colostrum de substitution peut être utilisé. L’idéal est d’avoir au congélateur du colostrum prélevé sur d’autres femelles lors de naissances précédentes, ou du colostrum de chèvre ou de vache.
Faire préparer du plasma par son vétérinaire en cas d’échec du transfert d’immunité devrait devenir une habitude en France comme ça l’est en Angleterre : dans certains cas , seule l’injection de plasma peut sauver la vie du cria et éviter la septicémie foudroyante. La mesure du taux d’IgG permet d’évaluer le besoin de transfusion.
SURVEILLANCE DES 1ères 24h :
Côté soins, si tout va bien je ne fais rien de plus après la naissance pour laisser le lien maman/bébé se faire.
Surtout il faut éviter de céder à l’envie de manipuler et de cajoler le cria, pour ne pas créer d’imprégnation.
Je m’assure régulièrement que le cria tète bien, et qu’il n’y a pas de saignement ou de fuite d’urine au niveau du cordon ombilical.
Ces deux soucis sont arrivés plusieurs fois sur l’élevage, et il faut intervenir très vite : avec une hémorragie, il faut clamper le cordon, et en cas de fuite d’urine (persistance du canal de l’ouraque) il faut assécher régulièrement à la teinture d’iode, et parfois faire une couverture antibiotique car le risque d’infection généralisée est très élevé. Une opération chirurgicale peut être nécessaire.
FAIRE UNE COURBE DE POIDS :
L’idéal est de peser le cria le 1er jour pour pouvoir surveiller sa courbe de poids (il est normal qu’il perde un peu de poids le 2e et 3e jour, mais ensuite le gain doit être régulier). Un cria pèse en principe entre 6 et 10kg à la naissance. En-dessous de 5kg, il est considéré comme à risque et il faut une attention et des soins accrus (le petit Oméga ci-dessus – le cria gris avec le manteau – pesait seulement 4,3kg à la naissance et avait souffert d’hypoxie, un vrai challenge !)
Reste ensuite à savourer le plaisir de voir ce nouveau petit être s’ébattre dans le troupeau… et à lui trouver un nom 😉
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Souvenirs… ETAPES D’UNE NAISSANCE : Kiwi, petit mâle gris, le 04/09/2012 :
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