Les aménagements

AMÉNAGEMENTS POUR BIEN ACCUEILLIR DES ALPAGAS

© Christel CHIPON - 2017

La mode actuelle des petits camélidés fait hélas aussi leur malheur : le nombre d’éleveurs incompétents (car non formés aux spécificités de ces animaux) et de maquignons sans foi ni loi explose. On présente l’alpaga / le lama comme l’animal le plus facile et le moins coûteux à gérer qui soit : un bout de pré, un peu d’herbe, trois brins de foin en hiver, rien d’autre à prévoir… Même pas besoin de bonnes clôtures : « 80 cm suffisent », affirment certaines annonces du trop tristement célèbre Bon Coin…!

La tendance actuelle sur les forums, par exemple, est de proclamer que les alpagas et lamas n’ont pas besoin d’abri. C’est hélas une idée tenace et récurrente dans beaucoup de publications alors que rien n’est plus faux…

Ces animaux sont originaires d’un milieu naturel bien particulier (la cordillère des Andes) qu’ils ont quitté depuis trop peu d’années pour permettre une évolution de l’espèce suffisante pour s’adapter partout et à tous les climats sans intervention humaine. C’est donc à nous, détenteurs et éleveurs, de veiller à leur assurer bien-être et bonne santé.

UN ABRI ? Oui, c'est INDISPENSABLE !

L’argument massue pour « prouver » l’inutilité de l’abri est toujours le même : « les miens n’y rentrent jamais, quel que soit le temps, DONC ils n’en ont pas besoin »  🙁

Pourtant le refus des petits camélidés de séjourner dans l’abri qui leur est offert n’est EN RIEN une preuve qu’ils n’en ont pas besoin !!! Si des propriétaires ou éleveurs constatent que leurs alpagas ne fréquentent pas l’abri mis à leur disposition, ils DOIVENT se remettre en question : c’est que quelque chose dans la conception de cet abri, son emplacement ou son utilisation (piège pour les soins, notamment) inquiète les animaux au point de leur faire préférer l’extérieur. Ils sont des animaux de proie : leur instinct de préservation, plus fort que dans les autres espèces domestiques, dicte ce comportement, quitte à mettre leur santé en péril.

Les alpagas (plus que les lamas) N’AIMENT PAS l’humidité, et ils la supportent mal, parce qu’ils ne sont pas conçus pour des climats humides, tout simplement. Leur toison ne contient pas de graisse : elle les protège parfaitement du froid sec, mais elle finit pas s’imprégner de la pluie, avec les risques de pneumonie qui en découlent si l’alpaga reste dehors non-stop sous des pluies continues. Un abri sans courant d’air est indispensable à leur confort et leur bonne santé, avec des râteliers, des mangeoires, une zone centrale qu’ils utiliseront comme toilettes et des zones de couchage sur les côtés.

S’ils se sentent en confiance dans leurs abris, les alpagas aiment s’y réfugier par mauvais temps ou par forte canicule, mais aussi ils y rentrent pour dormir le soir – hormis lors des très belles soirées estivales où ils apprécient les nuits à la belle étoile -, sans qu’il soit besoin d’aller les chercher et de y les enfermer. Les mâles comme les femelles !

Quelques point importants pour augmenter le confort et la confiance des animaux dans leur abri :

  • une surface adaptée au nombre d’animaux
  • une hauteur de plafond suffisante
  • une entrée large (d’autant plus large qu’il y a beaucoup d’animaux), et si possible au moins une 2e entrée pour les grands abris
  • un bon éclairage, avec des fenêtres, et la vue sur l’extérieur
  • un sol non glissant, une zone de couchage propre (la zone centrale de l’abri étant presque toujours consacrée aux toilettes, il importe de nettoyer régulièrement la litière pour que cette zone ne s’étale pas).
  • pas d’accès inopportun de curieux ou de chiens, pas de voisinage bruyant à proximité immédiate de l’abri

LA SURFACE NÉCESSAIRE et LA DISTRIBUTION DE L'ESPACE

La surface minimale pour détenir des alpagas donne lieu à beaucoup de discussions, mais il n’y a pas de réponse standard, puisque tout dépend de la nature des terrains, du boisement, de l’humidité hivernale…

Pour faire simple, on donne souvent l’estimation d’une base de 1000 à 2000m² + 1000m² par alpaga (soit 3 à 4000m² minimum, idéalement, pour avoir 2 alpagas).

Ensuite, même avec un seul groupe d’alpagas, il ne suffit pas d’avoir juste un pré avec un abri dedans : quelques aménagements s’imposent. 

L’idéal est de séparer l’espace en 2 ou 3 parcelles pour une rotation indispensable à une bonne lutte antiparasitaire.

Il faut aussi prévoir un enclos de taille restreinte autour de l’abri, dans lequel il est possible de mettre les animaux en sécurité en cas de mauvais temps ou pour toute autre raison, sans avoir pour autant besoin de les enfermer dans l’abri.

Et pour les soins il est bon d’avoir un petit corral de taille réduite dans lequel on fera toutes les manipulations (ou de disposer de claies faciles à déplacer pour créer ce corral là où c’est nécessaire) : l’objectif est de ne pas utiliser l’abri comme « piège », il doit rester un lieu de confort et de détente pour les animaux, où l’on doit pouvoir se déplacer parmi eux sans qu’ils craignent qu’on les manipule contre leur gré.

LES CLÔTURES

Les alpagas respectent plutôt bien les clôtures et ne cherchent pas à s’enfuir s’ils sont bien là où ils sont, c’est exact. Mais il adorent se gratter et abîment facilement les clôtures de fortune, et ils sont parfaitement capables de sauter si une raison les y pousse.

Clôture en bordure de la forêt : grillage à 1m50 + double rang de lisses en châtaignier

Le barbelé doit être totalement proscrit : s’il se prend dans la toison, c’est un piège mortel.

La clôture électrique convient pour les lamas, mais les alpagas y sont peu sensibles (ou alors il faut multiplier les hauteurs de fil, ce qui peut être dangereux si le fil se détend).

L’idéal est une clôture en grillage à mouton avec des piquets pas trop espacés (2m50 à 3m maxi) afin de limiter les déformations du grillage quand les alpagas se propulsent dessus latéralement pour se gratter les flancs.. Ils y mettent une énergie impressionnante, il faut les voir faire !

La hauteur de 1m20 convient pour les alpagas, personnellement je préfère 1m50 pour les clôtures extérieures afin d’assurer une bonne protection contre les intrusions (chiens errants notamment).

Un ruban électrifié ou des lisses de bois peuvent être ajoutés pour sécuriser au maximum, notamment avec les lamas, ou pour des étalons.

Les clôtures intérieures peuvent être réalisées avec du grillage vert de jardin, moins coûteux.

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Éthique et castration

Comme chaque année à cette saison, le vétérinaire est venu mi-novembre castrer un groupe de jeunes mâles destinés au loisir.
C’est une intervention brève, qui se réalise sur l’alpaga debout, légèrement sédaté et avec anesthésie locale. Un antidouleur/anti-inflammatoire et un antibiotique préventif (pénicilline) sont administrés avant l’intervention.
Certains mâles montrent un peu d’inconfort pendant quelques heures après dissipation de l’anesthésie locale, mais au bout de 24h ils sont revenus à leur comportement normal, tout est oublié.

Après quelques jours de surveillance de la cicatrisation, ils pourront partir comme alpagas de compagnie faire le bonheur de leur nouvelle famille sans développer, en arrivant à l’âge adulte, les comportements bagarreurs parfois très violents typiques des mâles entiers. Et, en bonus, leurs dents de combat ne se développeront pas, ce qui supprime également un souci majeur pour le propriétaire qui n’a pas toujours un tondeur ou un vétérinaire prêt à limer ces crocs potentiellement dangereux qui sortent à partir de 24-30 mois sous l’effet des hormones.

Alors pourquoi si peu d’éleveurs proposent-ils des mâles castrés ?
La réponse est évidente : un mâle ne doit pas être castré avant ses 12 mois au minimum, voire plus si son développement est jugé insuffisant. Donc castrer sur l’élevage représente un délai de mise en vente considérable, un coût et une prise de responsabilité que peu d’éleveurs ont envie d’assumer.
Et d’une certaine manière c’est hélas compréhensible, puisque un mâle castré de 15 mois sain, suivi et bien éduqué ne se vend pas mieux ni plus cher qu’un cria de 6 mois tout juste sevré et non éduqué… Pour ceux que l’éthique n’étouffe pas, le calcul de rentabilité est vite fait, d’autant que souvent l’objectif est de vendre les crias au plus vite afin de vider les prés pour la tournée suivante ! Alors pensez-vous, il faut être stupide pour garder des jeunes jusqu’à 14/18 mois en moyenne, investir de l’argent et beaucoup de temps pour les nourrir, les soigner, les éduquer, les castrer. Sans parler de la responsabilité que cela représente, car le risque de perte n’est pas inexistant pendant ces mois de croissance du jeune mâle.
Tout ça pour au final les vendre au même prix que le cria de 6/8 mois, voir moins, parce que (et c’est ubuesque) beaucoup d’acheteurs considèrent alors que le mâle étant castré ne vaut plus rien puisqu’il n’a plus de potentiel reproducteur…

Et je ne parle pas des pseudo-éleveurs qui arrachent le cria sous la mère sans sevrage, sans certificat vétérinaire, sans puçage évidemment, et le déposent manu militari dans la fourgonnette de l’acheteur contre espèces sonnantes et trébuchantes. Ni vu ni connu, pas de traçabilité, aucune responsabilité vis-à-vis de l’acheteur puisque ni contrat ni facture… Tout bénéf’. Alors castrer, pensez-vous, quelle idée stupide !

Et bien sûr pour contrer ceux qui préconisent de castrer les alpagas destinés au loisir chez des particuliers ou pour des activités de visite ou de médiation, certains argumentent que garder les mâles entiers ne pose pas de souci, que « chez eux », il n’y a aucun problème, que leurs clients n’en ont jamais eu non plus.
Ben voyons…
Sauf que des témoignages ces clients qui se retrouvent embarrassés par leurs mâles entiers devenus violents entre eux (voire vis-à-vis de l’humain car imprégnés car vendus trop jeunes sans les conseils d’éducation adaptés), j’en ai accumulé un bon paquet, c’est très loin d’être rare mais silence, il ne faut pas en parler, c’est pas bon pour le business.
A moins d’avoir un groupe important dans lequel l’agressivité est généralement diluée par le nombre, garder des mâles entiers adultes en duo ou trio génère souvent, tôt ou tard, des risques de bagarres impressionnantes et de blessures.

Et puis l’éthique de l’élevage, c’est aussi d’écarter de la reproduction des animaux porteurs de défauts congénitaux, de problèmes morphologiques sérieux (aplomb, dentition), voire de problème comportementaux (le tout souvent lié à de la consanguinité non contrôlée). Et on assiste au contraire à une course à la stupidité : puisque ce mâle a des défauts, on va brader son prix, donc surtout pas s’embêter à le castrer avant… Et le résultat, c’est que ce mâle se retrouvera à saillir des femelles à la chaine (regardez sur le Bon Coin les mâles proposés à la saillie par des particuliers ou pseudo-éleveurs… C’est à frémir).
L’autre jour je suis tombée, sur FB, sur les photos d’un type qui s’amuse à élever : il fait faire des crias à une malheureuse femelle affligée de « wry face », un souci congénital qui condamne le plus souvent le cria, incapable de se nourrir correctement. Cette femelle a eu la chance de survivre à cette difformité, mais en aucun cas elle ne devrait reproduire : l’hérédité de ce type de souci est avéré, cela ne ressortira pas forcément dans chaque cria, mais ils seront porteurs, et diffuseront le défaut à leur tour 🙁

Plus ça va, plus les gens s’improvisent éleveurs sans la moindre connaissance solide sur les alpagas et leurs particularités, et plus on voit des situations dramatiques. Mais bien sûr dès qu’on essaie d’en parler et d’avancer la notion d’éthique, on nous balance que notre seul but est en réalité de protéger notre marché : castrer un mâle, c’est éviter qu’il reproduise chez quelqu’un d’autre.
Ben… Oui, c’est exact, et ça fait partie de l’éthique de l’éleveur et de son sens des responsabilité d’agir ainsi, comme dans le monde des chiens, des chats ou des chevaux !
Si je juge qu’un mâle peut faire un bon reproducteur, il est vendu comme tel, et au prix d’un bon reproducteur, c’est simple, parce que j’ai investi de l’argent pour acheter des parents de qualité et gérer mes animaux au mieux sans lésiner sur les coûts d’élevage.
Si je juge que ce mâle n’est pas assez bon pour reproduire, ou qu’il n’y a pas assez de demandes d’éleveurs sérieux pour lui assurer une carrière dans un élevage correct, en effet il sera castré et vendu (à prix plus bas, souvent à perte hélas) comme alpaga de loisir. Mais en aucun cas il ne sera vendu entier à petit prix juste pour vider le pré,

L’éleveur qui brade ses mâles entiers, bons ou pas, scie la fragile branche sur laquelle il a déjà du mal à se tenir en équilibre : la plupart des acheteurs particuliers, des fermes pédagogiques, des pseudo-éleveurs qui veulent faire reproduire se fichent souvent de la qualité et de la génétique (et j’en ai eu quantité au téléphone ou dans des échanges par mail au fil des années) : ils veulent juste un mâle pas cher et des femelles encore moins cher pour produire des crias pas cher.
Et le cercle vicieux continue et la situation s’aggrave, et les alpagas en paient les conséquences…

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